TROIS JOURS A BARCELONE (13)
Chapitre 13 / Le resto
Nous quittons Rochebonne.
Solal prend la route qui longe la côte.
Nous nous dirigeons vers Cancale. Nous passons devant la plage du Minihic puis celle du Pont.
A une dizaine de kilomètres, nous nous engageons sur une petite route où deux
voitures ne peuvent pas se croiser.
– Où tu m’emmènes, Solal ?
– Surprise !
Le ciel est menaçant. Il va pleuvoir. On aperçoit déjà au loin déferler des murs de
pluie sur la mer agitée. La température baisse de deux degrés d’un coup.
– On arrive bientôt ? On va se prendre un gros grain sur la tête !
– T’inquiète…
A cet instant, le moteur de la voiture a des ratés.
Solal me regarde, inquiet.
– Merde, Solal ! Tu as mis de l’essence ?
– Je me suis dit que j’aurais assez pour aujourd’hui.
– Putain, Solal ! Tu le fais exprès ou t’es idiot ?
– Je ne pense pas être idiot… J’ai merdé…
Le moteur cale.
Solal gare la vieille Clio tant bien que mal sur le bas-côté.
La pluie commence à tomber doucement. Puis soudain, un vrai déluge s’abat sur
nous dans un vacarme assourdissant.
– On fait quoi ?
– On est à cinq minutes du resto ! On y va à pied !
On appellera une ambulance plus tard !
– Une ambulance ?
– Oui, pour ma Clio !
– Une dépanneuse, tu veux dire !
– C’est pareil, non ?
– Tu es complètement dingue, Solal. Je ne m’habituerai jamais.
Nous sortons de la voiture.
Je n’ai pas fait deux pas que je suis trempée jusqu’aux os.
Solal a trouvé un vieil anorak dans le coffre. Il le met au-dessus de nos têtes pour
nous protéger. Nous courons jusqu’au restaurant en rigolant et en criant.
En passant la porte, je lis le nom de l’établissement sur le fronton : La Marelle.
– C’est joli comme nom… Je ne connaissais pas. Tu es déjà venu ?
– Oui, c’est un pote d’enfance qui tient ce resto. Il est très coté dans la région et les
réservations se font au moins deux mois à l’avance.
– Ouah !!! C’est super beau !
Dans l’entrée, trône un bar immense digne des plus grands hôtels de luxe. Ensuite,
s’ouvre une salle gigantesque avec ses tables rondes pour deux personnes, pour
quatre, pour dix ! Il y a des chefs de rang, des serveurs, des sommeliers.
Nous sommes accueillis par une jeune femme magnifique, habillée tout en noir avec
un tablier rouge vermillon, très distinguée.
– Bonjour, puis-je prendre votre… manteau, Madame ? Monsieur ?
– Oui, bien sûr !
Solal lui tend son anorak trempé et moi ma veste qui ne ressemble plus à rien tant
elle s’est déformée sous l’effet de l’humidité.
– Vous avez réservé à quel nom ?
– J’ai réservé au nom de Marion.
– Oui, veuillez me suivre, s’il-vous-plaît.
Je chuchote à l’oreille de Solal.
– C’est super classe ici ! Tu as de quoi payer ?
– Ben oui ! Je dilapide mes économies.
– Tu n’en as pas !
– Justement !
Solal continue à faire des petits boulots en intérim en espérant devenir un écrivain
célèbre. J’ai pas mal d’économies et je gagne très bien ma vie. Cela lui laisse le
temps… Il n’a pas l’air de souffrir d’être entretenu par une femme !
– Je paierai ma part, si tu veux…
– Tu es folle ! Je te demande en mariage ! Ce n’est pas pour payer l’addition !
La jeune femme nous installe à notre table, face à la mer.
C’est incroyable cette vue. Devant nous, la mer en furie martyrise les petites îles
proches de la côte. Les oiseaux marins se sont abrités. De la salle, on entend à
peine le bruit du vent.
– C’est magnifique, Solal !
– Et oui, je te l’avais dit ! On se souviendra à jamais du jour où nous avons décidé de
nous marier !
– Je t’aime… On mange quoi ?
– Surprise !
– Encore !
– Et oui ! J’ai choisi pour nous. Tu verras, tu ne seras pas déçue.
Je ne suis pas déçue en effet :
« Menu :
Ravioles de Saint-Jacques au caviar, mousseline de topinambours
Noix de Saint Jacques, risotto de sarrasin, émulsion d’huitres et fèves de tonka,
sauce au lait fermenté
Saint Honoré revisité aux fruits de saison. »
– Pourquoi tu m’as demandée en mariage, Solal ?
– Pour nous, pour ne plus perdre de temps… On s’aime… Je veux qu’on se marie
dans la cathédrale de Saint-Malo avec tous nos potes !
– Et la famille ?
– Oui, bien sûr… S’il le faut…
– Quand ?
– Cet été ?
– Génial !!!
Le temps ne s’améliore pas. Le personnel du restaurant nous prête un parapluie
pour repartir. Nous courons comme des enfants jusqu’à la voiture pour récupérer le
portable que Solal a oublié afin d’appeler un taxi. Nous faisons l’amour à l’abri de la
tempête et cachés par la buée des vitres de la vieille Clio…
Au sujet de l'Auteur :
Gwen Le Tallec Auteur de romans jeunesse et de nouvelles
Site pro : http://www.gwen-le-tallec.fr/
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Introduction :
EVENEMENT ! LE MAG' s'ouvre aux auteurs, et quels auteurs !
Gwen Le Tallec , que nous avions rencontré et interviewé il y a 6 mois
nous offre pour un RDV HEBDOMADAIRE sur LE MAG',
la lecture de son dernier ROMAN !